Crues historiques, inondations dramatiques : une bonne partie de la France était en bottes et cuissardes la semaine dernière. Tout cela à cause de pluies, nous ont répété les journaux, « diluviennes ». L’occasion de s’interroger sur le sens du Déluge, de biblique mémoire.
Rappelons que, selon la Genèse, Dieu fit pleuvoir à torrents pour « effacer de la surface du sol tous les êtres que j’ai fait », et punir de ses péchés l’humanité (et avec elle les infortunés animaux). Noé, le seul juste, fut chargé de construire une arche et d’y embarquer des couples de chaque espèce. Quand les eaux redescendirent, l’arche s’échoua sur le mont Ararat, et la colombe rapporta un rameau d’olivier, preuve que la végétation avait repris. Dieu, satisfait, créa l’arc-en-ciel comme symbole de cette nouvelle alliance entre lui et une humanité régénérée.
Mais il ne faudrait peut-être pas prendre la Bible au pied de la lettre. Spinoza, dans son Traité théologico-politique (chapitre 15), a été l’un des premiers à proposer une interprétation rationnelle des épisodes surnaturels contenus dans le texte sacré. Deus sive Natura : Dieu, c’est la nature, et rien de ce qui est divin ne saurait donc être contre-nature. Tous les miracles doivent avoir leur explication. Spinoza en donne quelques exemples : « le décret divin qui ouvrit la mer aux Hébreux ne fut rien autre chose qu’un vent d’orient qui souffla avec violence pendant toute la nuit. »
S’agissant du déluge, on pourrait donc épouser la dernière thèse scientifique en vogue : il y a 7 500 ans, le niveau de la Méditerranée aurait monté au point de rompre la chaîne montagneuse des Dardanelles, et de provoquer un déversement d’eau gigantesque qui aurait créé la mer Noire. Le Déluge biblique ne serait qu’une affaire de plomberie planétaire.
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